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100 % monnaie

Le « 100 % monnaie » (100% money) est une proposition initiale de l’économiste américain Irving Fisher de 1935 qui consiste en un transfert de la création monétaire depuis les banques privées vers la banque centrale, en imposant aux banques commerciales des réserves de 100 % des dépôts monétaires, au contraire du système de réserves fractionnaires.

Ce projet a été fortement défendu, entre beaucoup d’autres1, par les économistes Maurice Allais, Milton Friedman et Christian Gomez (banquier et élève d’Allais) et dans une certaine mesure (narrow banking) par James Tobin pour défendre ce qui devrait être une prérogative de l’État et seulement de l’État : l’émission de toute nouvelle monnaie.

David Ricardo défendait cette même idée, lui qui écrivait « Supposons qu’il faille un million en argent pour préparer une expédition. Si le gouvernement émettait un million de papier-monnaie l’expédition se ferait sans qu’il en coûtât rien à la nation ; mais si en déplaçant ainsi un million d’argent monnayé, une banque faisait l’émission d’un million de papier, et qu’elle le prêtât au gouvernement a 7 pour cent, en déplaçant de même un million de numéraire, le pays se trouverait grevé d’un impôt perpétuel de 70,000 liv. par an. La nation paierait l’impôt, la banque le recevrait, et la nation resterait, dans les deux cas, aussi riche qu’auparavant. L’expédition aura été réellement faite au moyen du système, par lequel on rend productif un capital de la valeur d’un million, en le convertissant en denrées, au lieu de le laisser improductif sous la forme de numéraire ; mais l’avantage serait, toujours pour ceux qui émettraient le papier ; et comme le gouvernement représente la nation, la nation aurait épargné l’impôt, si elle, et non la banque, avait fait l’émission de ce million de papier-monnaie.»

Il s’agit d’une réforme radicale du système bancaire fondée sur la dissociation entre la monnaie et le crédit.

En aout 2012, deux chercheurs du FMI publient un rapport soutenant cette proposition2.

Rappel

Dans le monde moderne, il existe plusieurs types de monnaie :

  • la monnaie centrale (monnaie de base), créée par la Banque centrale et prêtée aux banques commerciales. Elle comprend d’une part les espèces (pièces et billets) ou monnaie fiduciaire, mais aussi les réserves obligatoires que les établissements financiers doivent détenir dans une certaine proportion (1 % dans la zone euro depuis le 18 janvier 20123) du montant des dépôts qu’elles gèrent. Dans la zone euro, la BCE (Banque centrale européenne) ne peut prêter qu’aux établissements financiers (le « refinancement »), à un taux d’intérêt qu’elle ajuste en fonction de la conjoncture (de 0,5 % à 1 % actuellement), mais la monnaie centrale peut ensuite être achetée par les agents non bancaires sous forme d’espèces ou monnaie fiduciaire ;
  • la monnaie scripturale (monnaie secondaire) créée par les banques commerciales, par simple jeu d’écriture lorsqu’elles accordent un prêt à une administration, un particulier ou une entreprise, et qu’elles inscrivent le montant correspondant sur le compte de leur client, sans disposer nécessairement initialement de monnaie centrale ni de dépôts d’épargne. Cette forme de monnaie représente plus de 92 % du montant total des euros comptabilisés en tant que monnaie (Agrégat M3).

Passage au 100 % monnaie : deux mesures qui doivent être prises simultanément

Séparation des banques en trois types distincts selon les fonctions assurées

a – Banques de dépôts et paiements : Gestion des comptes bancaires et moyens de paiement. A moins d’être des succursales publiques de la Banque Centrale, ces banques (interdites de prêter) n’auraient que la possibilité de gagner de l’argent avec les comptes bancaires (dépôts à vue) de leurs clients, en leur offrant une liquidité égale/supérieure aux ‘billets’ (paiement en-ligne), et surtout une meilleure sécurité de paiement commercial (carte à puce, protection, identification par code ou mot de passe, blocage, remboursement…); et pour cela d’imposer des taux sur toutes les transactions bancaires de leurs usagers : monnaie électronique, cartes bancaires, virements, chèques, retraits bancaires aux DAB

b – Banques d’épargne et d’emprunts : intermédiaires entre les épargnants (offre) et les emprunteurs (demande), en prêtant aux uns uniquement l’argent épargné par les autres (à sommes égales sans effet multiplicateur), avec des taux légèrement plus bas pour les épargnants (prêteurs) et légèrement relevés pour les emprunteurs, afin qu’elles puissent dégager une marge entre les deux pour gagner de l’argent, en échange du travail et risque à prêter aux uns et pas aux autres. Ces banques étant particulièrement ‘systémiques’ pour l’économie-réelle, leur régulation les obligerais à posséder un minimum de fonds propres sur une fraction de tous leurs emprunts accordés pour se couvrir du défaut (équivalent Accords de Bâle successifs).

c – Banques d’affaires et d’investissements : Proposition supplémentaire de Maurice Allais au plan initial d’Irving Fisher, consistant en des ‘banques’ ou ‘fonds de placement’ moins régulés et ainsi autorisés à investir tous leurs fonds propres (argent liquide de leurs clients/actionnaires) dans toute affaire à plus ou moins ‘hauts rendements’ et donc tout aussi risquée, mais toujours très liquide (bourses, produits financiers, spéculation…).

Notes :

  • Tout rapprochement des trois fonctions serait interdit.
  • Il ne faut pas confondre cette proposition avec la tentative du Glass-Steagall Act qui distingue deux métiers bancaires et les déclare désormais incompatibles :
    • la banque dont l’activité est celle de dépôts [a] et de prêts [b] sans séparation des deux métiers [a+b] contrairement à la proposition « 100 % monnaie »,
    • la banque d’investissement [c] (investment banking, en anglais), c’est-à-dire les opérations sur titres et valeurs mobilières.

Couverture à 100 % des dépôts à vue par de la monnaie de base dans les banques de dépôts avec le soutien de la Banque Centrale

Les dépôts à vue dans les banques de dépôts devront être couverts à 100 % par de la monnaie de base. La banque Centrale émettra autant de monnaie de base que nécessaire sous une forme à déterminer (achat d’actifs, prêt, don).

Le rôle des banques de prêts serait limité à la seule intermédiation financière. Dans leurs opérations de crédit, les banques devraient trouver des ressources à terme pour les financer.

Par rapport à la situation d’aujourd’hui, trois points importants

  • D’une part, les ressources à temps des Intermédiaires Financiers ne devraient pas être confondues avec de la monnaie et se différencieraient des caractéristiques de celles d’aujourd’hui soit par une liquidité moindre (Dépôts à terme), soit par des prix de sortie avant l’échéance plus aléatoires.
  • La transformation financière doit être interdite.
  • Les banques de dépôts n’ayant plus les bénéfices de la création monétaire pour se rémunérer, les services monétaires seront payants. Les soldes de dépôts à vue ne pourront pas être considérées comme une épargne, même temporaire. Elles ont à être traitées comme de la « monnaie stockée » utilisé par les agents économiques pour harmoniser leurs flux d’entrée et de sortie de fonds dans le temps. Elles n’ont aucun besoin d’être rémunérées.

Une telle réforme permettrait

  • À l’État, donc au peuple dans son ensemble, de bénéficier intégralement des bienfaits des émissions monétaires, aussi bien concernant le choix de la quantité de monnaie en circulation, sa répartition et les intérêts qui représentent des sommes considérables sur les créances détenues par les banques (environ 100 à 120 milliards d’euros par an, pour la France).
  • De mettre fin à l’inflation que nos économies capitalistes subissent depuis le début du système bancaire actuel.
  • De détruire le lien artificiel et pervers entre création et destruction de monnaie et le mécanisme de crédit bancaire – De permettre à nos économies de procéder à l’inévitable processus de désendettement public et privé sans passer par une phase destructrice de déflation subie ou d’hyperinflation organisée.
  • Que le taux d’intérêt puisse enfin jouer son rôle autorégulateur sur les marchés financiers et ainsi freiner les phénomènes de boom et de dépression.

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